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Compte-rendu des 5èmes rencontres du FFFOD "Qualité et Développement"

Les 5èmes rencontres du FFFOD - Qualité et Développement
COLLECTIF - frederic.haeuw@algora.org - décembre 2004

Metz, du 3 au 5 novembre 2004

Les Cinquièmes Rencontres du FFFOD, organisées cette année avec l’appui d’INFFOLOR et du Conseil Régional de Lorraine, se sont tenues à Metz, à l’Hôtel de Région de Lorraine les 3, 4 et 5 novembre 2004. Autour du thème "Qualité et développement", l’objectif annoncé était d’imaginer des solutions qualité pour le développement des formations ouvertes et à distance (FOAD) en éclairant la relation entre acheteurs, prescripteurs et prestataires de service, dans le contexte renouvelé par la nouvelle loi de la formation professionnelle, et en améliorant la lisibilité de l’offre de FOAD, à partir des outils disponibles.

La formation professionnelle vit en effet une époque charnière de son histoire, marquée par deux transformations significatives : la décentralisation et la nouvelle loi sur la formation professionnelle. Ce nouveau cadre administratif peut être une chance pour la formation ouverte et à distance, qui doit tout à la fois se développer, mais également se banaliser et devenir progressivement la manière la plus courante de se former. Ce n’est pas la moindre des difficultés que de passer de l’innovation à la généralisation, c’est à dire réduire les spécificités de la FOAD, tout en gardant l’esprit d’innovation et de transformation des manières d’apprendre, induites par l’intégration des technologies. Dans ce contexte particulier, les rencontres visaient à clarifier les relations entre acheteurs, prescripteurs et prestataires et de passer des représentations de chacun à un système commun de références. Outre cet objectif de mise en dialogue, les cinquièmes rencontres visaient également à imaginer des solutions qualité pour le développement de la FOAD, en améliorant la lisibilité de l’offre et en donnant une suite aux travaux antérieurement conduits sur le sujet, dont le Référentiel de Bonnes Pratiques élaboré avec l’AFNOR en 2003-2004 (1). Ce travail collectif et consensuel a toujours été envisagé comme une première étape et il s’agissait d’imaginer ensemble l’étape suivante.

Les rencontres se sont déroulées en quatre temps, que nous allons relater ci-après.

1er temps - le paysage de la FOAD et les perceptions des différents acteurs dans ce nouvel environnement

En guise d’entrée en matière de ce premier temps, Philippe Morin, directeur d’Algora, a dressé un portait rapide de l’état actuel de la formation ouverte et à distance. Il a articulé son intervention en trois points : le champ des pratiques et des ingénieries qui les sous-tendent, l’évolution des outils et des technologies éducatives et enfin la question du marché, qui ré-interroge le concept même de formation ouverte et à distance, auquel on pourrait lui préférer « individualisation » ou « flexibilité » :


Une table ronde a ensuite réuni des représentants de différents acteurs (direction du travail, OPCA, responsable de formation, consultant et offreurs de formation à distance), tous concernés à un titre ou un autre par le nouveau contexte législatif. Ces intervenants ont tentés d’expliquer la loi de mai 2004 et ses différentes déclinaisons : le DIF (Droit Individuel à la Formation) bien sûr, mais également les périodes de professionnalisation et la remobilisation des connaissances au delà de 45 ans et leurs articulations avec le plan de formation de l’entreprise et le CIF (Congé Individuel de Formation). Chacun s’est accordé à dire que la loi de 1971, adaptée à son contexte historique et ayant conduit à l’émergence des « stages de formation », était inadaptée aux besoins actuels et se pliait difficilement à une organisation plus flexible, en partie sur temps de travail et hors temps de travail, articulant différents types d’actions complémentaires et répondant autant à des besoins de professionnalisation qu’à des besoins d’épanouissement personnel. A cet égard, la nouvelle loi permet d’allier le développement et la valorisation des compétences nécessaires à l’entreprise et le développement personnel des individus. C’est donc un pas significatif vers l’utopie de la formation tout au long de la vie. On retiendra particulièrement l’enjeu de cette loi, reformulée ainsi par Jacques Barhy : « proposer des itinéraires individuels modulables, tout au long de la vie, avec des séquences de différents types (stages, formation sur poste de travail, FOAD, VAE, tutorat, passeport de formation, etc.) pour s’accomplir dans sa vie d’homme/ de femme, de citoyen et de salarié ». On notera également que la loi ne règle pas, loin s’en faut, tous les problèmes, notamment ceux de l’imputabilité et du contrôle, et qu’un vademecum devra probablement être produit ultérieurement pour décrypter la loi et la mettre en application.

Après la parole des ténors, chaque famille professionnelle regroupée en « tribu » était invitée à échanger leurs perceptions de ce nouvel environnement et à identifier des scénarii de développement et des pistes d’actions. Le postulat sous-jacent à la symbolique des « tribus » était que le dialogue avec les autres acteurs institutionnels serait facilité par l’échange préalable des perceptions et l’élaboration de positions communes, entre acteurs d’une même tribu. Les débats ont confirmé ce besoin d’échanges ethnocentrés, mais ont également fait apparaître beaucoup de points de vue communs.

D’une manière générale, les participants semblaient osciller entre enthousiasme et frilosité. Enthousiasme face à un nouvel environnement législatif qui permet de dépasser des blocages liés à la loi de 1971, mais paradoxalement, la nouvelle loi suscite également des sentiments, que l’on espère temporaires, tels que la frilosité, la crainte, la prudence. Au dire de certains, elle porterait même des risques de régression tel que le retour de la gouvernance de la formation par l’offre, versus la gouvernance par l’analyse de la demande. La loi du 4 mai et notamment le droit individuel à la formation (DIF) inquiète, semble-t-il, bon nombre d’acteurs et notamment les directions des ressources humaines d’entreprises, qui attendent des OPCA des aides pratiques à la mise en œuvre.

Même si les accords de branches ne sont pas tous signés, les DRH s’interrogent sur le financement du DIF qui s’additionne au plan de formation de l’entreprise. De leur point de vue, le DIF requiert de réorganiser certains processus du management, puisque le salarié doit co-construire sa formation avec l’employeur. Elles s’inquiètent des modalités de refus du DIF et d’un repli massif vers le CIF. La formation ouverte et à distance nécessite de revoir les offres de formation, ce qui ne peut se faire sans l’implication de tous les acteurs de la formation (OPCA, encadrement, partenaires sociaux, salariés…). En outre, la loi transforme le rôle du responsable de formation dont la zone d’influence s’étend désormais aux compétences et par conséquent au domaine des ressources humaines :


De leur côté, les OPCA, attendent des instances de contrôle plus de souplesse et de clarté dans les règles d’imputabilité des dépenses de la FOAD, parfois en contradiction avec le code du travail auquel ils se réfèrent. Le droit individuel implique pour les OPCA une formation à la carte. En l’absence de dispositifs de référence, les OPCA adoptent une position d’attente et renvoient la question aux régions et aux entreprises :


Pour les organismes de formation, le DIF implique une offre basée sur des dispositifs de vingt heures, ce qui en soi ne pose pas de difficulté majeure. Ils pointent cependant une sorte de contradiction dans les demandes des entreprises concernant les formations métiers qui ne peuvent s’inscrire sur vingt heures. De même, insistent-ils, le DIF accentue l’individualisation de la formation, ce qui ne va pas de soi pour les organismes traditionnels qui proposent et tirent bénéfice des formations collectives. Il nécessite de trouver des modalités pédagogiques - travail sur poste, hors temps de travail, individuel et collectif - qu’il faut combiner.

L’individualisation impose donc une réorganisation, pour laquelle il s’agit de repenser l’ingénierie des dispositifs et financer une montée en compétences des formateurs. Pour les organismes de formation, le DIF devrait contribuer à la mise en œuvre de FOAD, si l’on y ajoute la possibilité pour les salariés de se former hors temps de travail. Toutefois, ils doutent que cette mesure facilite l’accès à la formation de nouveaux clients tels que TPE et PME aux moyens financiers et techniques limités. Dans tous les cas, le DIF ré-interroge l’offre et la qualité de la prestation et demande aux organismes de s’adapter aux contraintes des différents acteurs.

Enfin, pour les organismes de formation publics, outre la nouvelle loi, la décentralisation n’est pas sans conséquence sur des dispositifs auparavant soutenus par l’Etat et qui se retrouvent désormais au cœur des politiques régionales. Les conseils régionaux deviennent un des acteurs incontournables pour faciliter la mise en oeuvre de dispositifs de FOAD. Ceux-ci attendent des organismes de formation qu’ils clarifient leurs cahiers des charges en pointant la valeur ajoutée pour l’apprenant. Il s’agit de veiller à l’adéquation entre les besoins réels et les offres à laquelle l’ancrage territorial devrait contribuer.


Ce premier temps d’échanges s’est conclu par un cocktail de bienvenue offert par INFFOLOR et le Conseil régional.

2ème temps – passer des représentations de chacun à un système commun de références

De retour jeudi matin en tribus, après une nuit de réflexion, il s’agissait d’exprimer à la fois les préoccupations et les enjeux de chaque famille, et de préciser les attentes à l’égard des autres acteurs. Nous noterons que beaucoup d’approches sont partagées et se répondent les unes aux autres. Les attentes réciproques sont réelles, bien qu’il semble parfois qu’à force de s’attendre mutuellement, on risque de faire du sur-place ! Curieusement, l’échelon national est un absent de marque dans les attentes, au point que l’on a pu avoir le sentiment qu’entre régionalisation et internationalisation, il n’y aurait plus de place pour l’Etat qui disparaîtrait complètement du paysage.

Après ces échanges, Jacques Peyrondet est venu restituer les travaux de la commission et de l’enquête « Bonnes pratiques commanditaires /prestataires », ouvert par le FFFOD en mars 2004. Le but de cette enquête est de contribuer à la réussite des prestations FOAD, en recensant et définissant les pratiques de prévention à mettre en oeuvre face aux risques qui peuvent apparaître. Elle visait à évaluer et compléter auprès des commanditaires et des prestataires les risques connus ou perçus dans les étapes d’avant vente, de réalisation et d’après vente. Il a été décidé, dans un premier temps, de s’intéresser plus particulièrement à la réalisation de supports pédagogiques multimédias, champ qui présente le plus de spécificités : ingénierie pédagogique, création médiatique et informatique.

Ces risques ont ensuite été illustrés par les protagonistes eux-mêmes, commanditaires et prestataires, au cours d’un débat qui a fait apparaître nombre d’incompréhensions réciproques.

3ème temps : développer la lisibilité de l’offre pour l’acheteur et le prescripteur

Face à ces incertitudes et à ces craintes, l’approche qualité semble être une manière de faciliter la mise en oeuvre de FOAD en apportant la preuve de la qualité des prestations. Il s’agissait tout d’abord, au cours de ce troisième temps, de voir comment utiliser le Référentiel des Bonnes Pratiques en prévention des risques sur un projet. Le RBP a donc été ré-interrogé à la lumière de cette question, afin d’identifier, processus par processus, les recommandations à extraire.

Que s’est-il passé depuis la mise sur le marché de ce référentiel ? Comment a t-il été diffusé et pour quoi faire ? Au cours d’une ultime table ronde, Jacques Naymarck et Jean Guilvout ont fait état de la diffusion à la fois du référentiel mais également des émissions TFS sur le sujet. Deux acteurs de terrain, Jean-luc Bessozi de la CCI 54 et Marie Hélène Mieszkin de la CCI 57 ont ensuite exposé la manière dont ce document, dans le cadre de la recherche-action 3R leur a permis de structurer leur réflexion, de monter des groupes de travail en interne et de progresser processus par processus dans la construction et la mise en oeuvre d’une nouvelle offre de FOAD. Gilles Freyssinet, enfin, a re-situer les travaux de l’observatoire européen de la e-qualité afin d’identifier les points de convergences.

Après cette journée chargée, un dîner de gala bien mérité nous attendait à l’Arsenal.

4ème temps : définir des orientations pour développer la formation ouverte et à distance

Le dernier temps des rencontres, le vendredi matin, visait à identifier les suites à donner au Référentiel de Bonnes Pratiques. Il s’agissait pour les participants de s’exprimer sur les étapes suivantes.

Pour initier ce dernier temps, Frédéric Haeuw s’est essayé à proposer, à sa manière, une synthèse de ces rencontres :


Mon activité de nomadisme au cours des cinquièmes rencontres du FFFOD, m’autorise à porter un regard distancié et à proposer quelques points de synthèse.

1. Tous citoyens du monde... et de la FOAD ?

Dans les « sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur » Edgar Morin nous invite à appréhender notre identité terrienne, c’est à dire la complexité liée au fait que nous sommes tous citoyens du monde dans des niveaux d’implication sociale imbriqués les uns dans les autres. Les rencontres du FFFOD sont toujours l’occasion de mettre en perspective notre propre positionnement.

L’année dernière, nous étions tous « du monde de la FOAD » avec un objectif de production, le RBP, qui a plutôt bien fonctionné en tant qu’objet fédérateur (on a même parlé d’intelligence collective). Cette année, la symbolique des tribus posait le postulat que pour ouvrir le dialogue avec les autres acteurs institutionnels, il faut d’abord établir des positions communes, entre acteurs d’une même tribu, ce qui peut, a priori, apparaître comme une forme de régression, de repli(s) sur soi. Toutefois, les débats du premier jour ont confirmé ce besoin de communication ethno-centrée : on peut remarquer que chaque famille a émis le souhait d’avoir des échanges (échanges de pratiques, essentiellement) au sein de sa propre famille : les régions, les organismes, les OPCA, etc... Mais par ailleurs, les débats font apparaître que beaucoup de questions sont communes aux différentes tribus, et que certaines attentes sont partagées et se répondent les uns aux autres, bien que parfois, les acteurs s’attendent les uns les autres, ce qui peut conduire à faire du sur-place. On est donc dans des aller-retour permanents entre « le monde de la FOAD », enchâssé dans un micro niveau, qui est celui de sa famille d’origine, et un macro niveau qui est le monde de la formation, voire le monde tout court. De mon point de vue le mérite de ces rencontres est sans doute d’avoir réduit les écarts de représentations, et le sentiment abusif d’écart de représentations et d’interprétations. Mais plusieurs questions restent en suspens :

la représentativité de ces tribus (composées de convaincus ?) et leurs extensions
l’hétérogénéité intrinsèque et extrinsèque des "tribus"
la question de l’objet fédérateur : est-il possible de trouver un autre objet fédérateur tel que le RBP ? N’a-t-on pas atteint avec celui-ci la limite de la "non contextualisation" ?
vers quels types de partenariats peut-on aller, autrement dit, échanger, mutualiser, coopérer... sur quoi et comment ? L’enjeu "d’apprendre à être partenaire et concurrent" peut-elle être autre chose qu’un voeu pieux ?
Quelque part, cette question rejoint la théorie des mondes sociaux et de leur étanchéité, telle que l’a développé en son temps Bernard Blandin.

2. Par delà les frontières...

La seconde remarque porte sur les frontières, qui est un thème réactivé par la FOAD. Evoquons tout d’abord les frontières, géographiques bien sûr (régionalisation et internationalisation), et la singulière disparition de l’échelon national ! Jacques Barhy a souligné le fait qu’aucune attente n’était formulée en direction de l’Etat, comme si l’Etat avait subitement disparu du paysage, ce qui est bien sûr loin d’être le cas. Mais on a aussi évoqué lors de ces rencontres la disparition progressive d’autres frontières. Entre les métiers tout d’abord, les éditeurs devenant aussi des offreurs de formation, les commanditaires apprennant à écrire des projets e-learning pour réduire le point de cette charge côté prestataire, etc. ; évoquons également la disparition progressive des frontières entre formation initiale et formation continue et, sur un autre plan, entre connaissance et information, entre e-learning et KM, etc. Lors d’une journée du FFFOD sur le travail collaboratif, Alain Derycke avait un peu provoqué l’assistance en disant que pour lui, il n’y avait pas de différence entre travail collaboratif et apprentissage collaboratif, tout cela étant le produit de l’activité humaine qui est par essence collaborative ! Cette question des frontières est particulièrement intéressante, a fortiori avec le postulat des tribus qui se définissent par un territoire.

Cette disparition des frontières atteint son paroxysme avec la "dilution" de la FOAD dans la formation, ce qui est l’objet de ma troisième remarque.

3. Cent fois sur le métier... ou la FOAD en voie de banalisation

Nous sommes un certain nombre à penser que la FOAD sera complètement intégrée dans nos pratiques lorsqu’on en parlera plus ! J’ai été frappé lors de la première journée, par le fait que les débats ont porté essentiellement sur le nouveau contexte de la formation, et curieusement, très peu sur la FOAD, ce qui tend à prouver que l’on a passé un cap ; par contre, deux sentiments contradictoires se mêlent :
d’un côté, la satisfaction, car la nouvelle loi rend possible les utopies que nous avons défendues depuis des années : on a bien montré que la loi de 1971 était adaptée à son contexte, mais inadaptée à l’intégration de nouvelles modalités de formation plus flexibles, mêlant temps de travail et hors temps de travail, par exemple, ou bien encore articulation entre professionnalisation et adaptation au poste de travail, etc. On a dit aussi que le nouveau cadre permettant d’allier harmonieusement le développement et la valorisation des compétences nécessaires à l’entreprise et le développement personnel des individus, on s’approche de l’utopie de la formation tout au long de la vie.
d’un autre côté des sentiments tels que la frilosité, la crainte, la prudence, l’immobilisme, l’attentisme (mots entendus tout au long du colloque) ! Pire encore, la nouvelle loi porterait même un risque de régression : par exemple, un retour de la gouvernance de la formation par l’offre versus la gouvernance par l’analyse de la demande, ou bien encore la rigidité des 20 h face à la flexibilité, etc.

Le paradoxe est le suivant : comment fondre la FOAD dans la formation tout en gardant les spécificités ? La question de la durée de vie du RBP est symptomatique de cette question.

Face à cela « cent fois sur le métier … », il semble nécessaire de repenser une fois encore l’ingénierie de nos dispositifs : un peu comme s’il fallait prendre à nouveau du recul pour mieux sauter le pas. L’un des exemples significatifs est le retour de l’individualisation.

4. Le retour de l’individualisation ou... "Si tu ne sais pas où tu vas, regarde d’où tu viens"

Est-ce un signe de cette régression ou bien le besoin de regarder d’où l’on vient pour savoir ou l’on va ? Il ne vous a pas échappé qu’on assiste à un retour en force du concept « d’individualisation », qui est sans doute le mot qui a été le plus prononcé au cours des rencontres. C’est peut-être, mais pas seulement, un effet du nom de la mesure phare de la loi qu’est le DIF ! Jacques Naymark évoque souvent l’alternance de cycles courts qui forment un cycle long, Il semble qu’on est passé de l’individualisation (dans les années 80) à la FOAD et au e-learning (dans les années 90/2000) pour arriver maintenant à l’individualisation des parcours de FOAD ! Toute la difficulté réside alors à résoudre un certain nombre de paradoxes : comment concilier individualisation et industrialisation, formation des petits nombres et des grands nombres, dans une logique de « marché » qui reste encore à identifier, avec des jeux d’acteurs complexes et des modèles économiques qui restent à construire !

Cela m’emmène à ma remarque suivante, qui porte sur la complexité inhérente à la FOAD.

5. La complexité engendre bien des complications ! Ou ...comment naviguer dans un océan d’incertitudes à travers des archipels de certitudes

L’ouverture de l’offre de formation va de pair avec la complexité : plus c’est ouvert, plus c’est complexe, mais c’est de la complexité que naît la vie et que naît l’intelligence par la rencontre avec l’autre. Comme je l’ai évoqué précédemment, avec la nouvelle loi, on passe d’un mode relativement dichotomique (plan de formation = besoin de l’entreprise, CIF = éducation permanente) à une imbrication des deux et à une complexification des modalités possibles. Or, de même que selon certains observateurs le monde de la formation résiste à la rationalisation, il résiste aussi à la complexité, ce qui conduit là encore à des positions d’attente (wait and see), et à des simplifications abusives. S’il n’est pas encore aisé de naviguer dans les arcanes de la loi, qui demande à être expliquée, dont les contradictions apparaîtront avec l’application (à tel point qu’il sera sans doute nécessaire de disposer d’un vade-mecum) nos efforts ne doivent pas tendre à simplifier mais au contraire à appréhender la complexité et poser des repères. Notre véritable ennemi, ce n’est pas la complexité, qui est inhérent à l’acte d’apprendre dans notre société dite « de la connaissance » mais la complication ! Pour lutter contre ce phénomène, posons des repères, revenons aux concepts de base, ce qui est l’objet de ma sixième remarque.

6. Des repères, des balises dans un environnement instable

Ma dernière remarque porte effectivement sur la nécessité de parler un langage commun, ce qui en quelque sorte boucle avec le point 1. Il n’est pas banal de constater que l’on doit s’interroger par exemple sur ce qu’est la formation, et encore moins banal que la réponse à cette question semble aussi simple :
. un apprenant identifié ;
. qui veut apprendre quelque chose de nouveau ou acquérir une nouvelle compétence ;
. et pour qui on détermine des moyens compatibles avec l’individu et l’objectif.

Poser des repères, c’est aussi formuler des objectifs rationnels et réalisables tel que celui-ci : « proposer des itinéraires individuels modulables, tout au long de la vie, avec des séquences de différents types (stages, formation sur poste de travail, FOAD, VAE, tutorat, passeport de formation, etc.) pour s’accomplir dans sa vie d’homme/ de femme, de citoyen et de salarié. » A cet égard, le terme itinéraire est pertinent. De même que la carte n’est pas le territoire, l’itinéraire n’est pas le parcours : l’itinéraire, c’est la prévision par le formateur, établie en co-responsablité avec l’apprenant.

Le parcours en revanche est le produit de l’activité de l’apprenant – on parle alors de parcours d’apprentissage – éventuellement en étant accompagné par un formateur. Mais l’acte d’apprendre appartient, de mon point de vue, à l’apprenant : on n’accompagne pas quelqu’un qui ne va nulle part ! Certains témoignages pourtant, parle de mystification : « un employé ne peut décider seul de son employabilité. »
Enfin, il faut se méfier des termes polysémiques ou ambigus : ainsi, on parle indifféremment de mutualisation, de partenariat, de relation de prestataires, de coopération … sans toujours mettre les mêmes sens derrière ces termes.

En terme de repère et de balise, il semble bien que le RBP, au delà de l’effet d’entraînement et de coopération dans son mode de production, peut jouer, dans sa version « doctrinaire mais non dogmatique », ce rôle de balise, de guide, voire de viatique pour des formateurs et des chefs de projets e-learning. Les témoignages de la seconde journée étaient éloquents, avec cependant une limite, en tout cas dans son utilisation actuelle, de n’avoir pas « encore » servi à construire des partenariats : c’est plutôt un outil de pilotage interne, et non encore de co-construction partenariale d’une offre de FOAD sur un territoire.

Pour terminer sur une note d’optimisme, et pour rompre une autre frontière, celle de l’art et de la raison, je finirai sur un petit poème… librement inspiré de Paul Verlaine, qui pourrait s’intituler « colloque sentimental », ou bien encore « le rêve familier de l’apprenant » :
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant, d’une FOAD inconnue, qui m’aide et que j’aime, et qui n’est jamais ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre, et m’aime et me comprend...

Frédéric Haeuw


Inspirés par le cadre très législatif où se déroulaient les rencontres – la salle des délibérations du Conseil régional de Lorraine - trois « amendements » ont ensuite été défendus à la tribune. La première possibilité offerte, pour donner plus de visibilité à la qualité des dispositifs de FOAD, visait la création d’un « label qualité FOAD » qui aurait permis de certifier des organismes ayant suivi les recommandations du référentiel. La seconde proposait de partir du référentiel pour créer une norme de la FOAD actuellement inexistante. La dernière possibilité enfin, défendait l’idée qu’il faut du temps pour s’approprier ce référentiel et pour l’adapter à son contexte et qu’une norme risquerait fort de figer des pratiques aujourd’hui multiples, face à l’évolution du contexte, tandis qu’un label risquerait d’exclure les petits organismes de formation ayant de faibles moyens pour financer les audits consécutifs d’organismes certificateurs.

Par une dernière concertation par « famille », c’est cette dernière option, qui doit maintenant être confirmée par le bureau, qui a été retenue à l’unanimité. Les participants aux rencontres ont décidé de poursuivre la voie de la diffusion du référentiel de bonnes pratiques en formation ouverte et à distance auprès des entreprises, des conseils régionaux, des OPCA, des organismes de formation publics et privés, des partenaires sociaux, avant d’aller plus loin. Beaucoup d’acteurs restent en effet à convaincre pour développer significativement la FOAD, qui reste par ailleurs difficilement identifiable en tant que telle. Certains qualifieront sans doute ce positionnement de frileux, d’autres considéreront que c’est peut-être une forme de sagesse face à la culture généralisée du zapping qui nous conduit sans cesse à brûler les étapes.

C’est enfin à Jacques Bahry qu’est revenu la charge de conclure ces rencontres qui, une fois encore, ont montré l’existence d’une réelle communauté d’acteurs, une organisation professionnelle capable de produire, dans le cadre pourtant conventionnel de rencontres annuelles, des points d’étapes significatifs d’un chantier en constante évolution :

Frédéric Haeuw

(1)Voir le dossier de presse sur le site du fffod : Dossier de presse RBP
et les vidéos sur le site de TFS : TéléFormation et Savoirs

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